Rene Daumal (Paris 1908 - 1944): Entrée des larves

26 de junio de 2015





Le suisse de l'église menait paître ses chèvres dans l'avenue vide.

Quelques enfants mouraient ou séchaient aux fenêtres — c'était le printemps et les mains des hommes se déroulaient au soleil, offrant à tous le pain de leurs paumes que les enfants n'avaient pas encore mordu.

Sur les terrasses on se retrouvait entre terre et ciel; il y eut beaucoup de crânes brisés ce jour-là, de jeunes gens qui voulaient voler au-dessus des jardins.

Les mouettes et les mouchoirs claquaient dans l'air et cassaient du bleu dans les vitres, des steamers de cristal s'enfuyaient par-dela les nuages.

Quand le soir vint, ce fut le tour des vieillards; ils envahirent les rues, assis sur leurs tabourets de bois grossier, ils charmaient les pigeons et buvaient du lait chaud.

Le ciel était seulement un peu plus foncé et plus haut.

Les arbres s'étirent dans le parc et tendent des pièges aux papillons de nuit; le suisse est rentré dans l'église et les chèvres dorment dans la crypte.

Les femmes hurlent soudain toutes avec des gorges de louves, parce que dans les faubourgs s'est glissé un homme nu et blanc venant des campagnes.








Le texte que nous reproduisons, ici et par la suite, est celui procuré 
par C. Rugafiori pour la collection « Poésie » de Gallimard 
(R. Daumal, Le Contre-Ciel suivi de Les Der­nières Paroles du poète, 1990)
Image: Photo couverture Rene Daumal
Les dosiers H - Editions L'Age d'Homme, 1993
Coollection particulière Madame Maxwell



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